ou comment débuter sa carrière scientifique en France…
Une fois décidée de reprendre mes études en histoire à l’Université Aix Marseille, j’ai du affronter un “combat” bien connu par tous les jeunes chercheurs: trouver un thème de recherches bien intéressant, attirant, scientifiquement pesant et surtout réalisable via mon bagage professionnel.
J’explique. Installée en France fin 2011, je gardais toujours mon rêve de continuer mon parcours de chercheuse en histoire. Je me rendais compte qu’avec ma première spécialisation (il s’agit de la problématique de légitimité du pouvoir princier dans la Russie médiévale) il n’est pas question d’espérer de faire quoi que ce soit au sein de l’université française!
Formée en histoire dans une université russe bien connue et réputée, je réalisais, quand-même, que je reste toujours une étrangère, une belle inconnue, dont la formation est bien différente du parcours normal suivie par les jeunes historiens en France.
Décidément, il fallait que je trouve pour mes recherches une idée bien claire, actuelle, considérable afin de pouvoir servie la base de mes études et au bout d’un an du travail acharné me « couronner » de mon Master II Recherche en histoire.
Lors d’un de mes voyages à travers la région de Provence, j’ai visité la ville de Toulon, son église orthodoxe russe et j’ai découvert qu’elle a été fondée par les émigrés russes dans les années 1920! Quelques coups de téléphone, une journée d’attente, mon rendez-vous avec un marguiller de la paroisse et voilà!!!! j’ai trouvé, j’ai enfin trouvé mon bonheur!!!! Les Russes blancs de Toulon, un sujet passionnant, pas connu, pas étudié, une histoire qui m’a touchée… un thème pour moi, quoi…
Les clés de réussite:
– j’ai choisi un sujet que je croyais maîtriser assez afin de pouvoir expliquer tous les détails à mon futur directeur de recherches.
– j’ai bien communiqué avec les paroissiens afin de pouvoir trouver les traces de cette émigration
– je me suis plongée à fond dans la lecture des ouvrages au sujet de l’émigration russe en France. Bonnes connaissances théoriques = base de vos recherches
– je me suis bien débrouillée pour trouver des archives. Beaucoup d’archives. Beaucoup. Encore plus et c’est jamais fini. C’est comme ça, c’est notre travail…
Les surprises:
La découverte d’une belle communauté des exilés russes dont la présence a été complètement ignorée par les chercheurs professionnels. Je ne croyais jamais pouvoir tomber sur un sujet pareil….
Le caractère occasionnel, inattendu et peu contrôlable de cette émigration toulonnaise. Un équipage d’un bateau, d’un transport militaire, dont la première destination était la ville de Rio au Brésil a donné le début de l’histoire des Russes sur les côtes varoises en 1921 suite à un certain nombre des jeux politiques. Il ne faut également oublier la spécificité de cette vague migratoire: on voit l’émigration militaire, de plus, forcée, sans possibilité de retour…
3. Anatoly HORODYSSKY (1881-1933), capitaine de vaisseau, spécialiste de l’artillerie navale, commandant du “RION”. En France, installé à Toulon, après à Paris, travaillait comme manœuvre. Membre actif de l’Amicale parisienne de la Marine, écrivain maritime. Décédé de la tuberculose.
Au bout de huit ans de recherches, je suis devenue spécialiste dans le sujet, je connais tous les détails, les noms, les destins, les endroits, les difficultés et les réussites. J’ai devant moi les années des voyages d’archives, de très belles rencontres, de très jolies larmes, de centaines des feuilles de correspondance, des nuits d’écriture et de réflexions…
J’ai bien réfléchi sur mes propres origines et de cette importance à appartenir à notre culture et histoire. Pour moi, ça reste une histoire bien personnelle, pas que professionnelle.
Grâce à eux, ces braves marins émigrés, j’ai retrouvé ma voir professionnelle et j’ai pu reprendre mes recherches. Actuellement, en dernière année de thèse, je prépare un autre texte et je pense à ma soutenance, je n’arrête pas à me souvenir de ces émigrés qui m’ont tant appris et tant donné.
Remerciements:
– à mon premier directeur de recherche M. Stéphane Mourlane pour son guidage et ses conseils ;
– à mon actuel directeur de recherche M. Jean-Paul Pellegrinetti pour son attitude, son aide, son développement de mes idées, son accueil au sein du CMMC où je me suis toujours sentie comme “chez moi”. C’est très important pour moi.
– à M. Georges Zapolsky pour son aide avec les archives et ses encouragements ;
– à tous les spécialistes et les archivistes en France et en Russie pour leur aide dans mes recherches d’archives ;
– mon professeur de français, Mme Larissa Liubarskaya, pour tout ce qu’elle a fait pour moi… sans elle, je ne pourrais jamais produire ce texte… Malheureusement, elle n’est plus parmi nous.
Margarita Rudkovskaya
Page perso sur le site du CMMC :
http://cmmc-nice.fr/wp-content/uploads/2012/08/CV_Uni_Margarita_Rudkovskaya.pdf
Page perso sur le site Academia.edu : https://mbds-fr.academia.edu/MargaritaRudkovskaya
Page perso sur le site Hal Archives ouvertes : https://hal.archives-ouvertes.fr/search/index